L’épidémie de « picote » de 1885
L’histoire d’une paroisse c’est aussi sa communauté qui vit les aléas de l’histoire.
Sans surprise, SJB a traversé son lot de crises : le grand incendie de 1879, l’explosion de 1889 et combien d’autres. Ce billet portera sur l’une des quatre pandémies ayant frappé SJB.
Le 28 février 1885, George Longley, conducteur de train pour la Grand Trunk Railway, arrive de Chicago à la gare Bonaventure. Il est fiévreux et a les mains, le visage et le corps couverts d’éruptions cutanées. L’Hôpital Général détecte la variole et refuse de l’admettre pour éviter la contagion. Il est alors transféré à l’Hôtel Dieu. Rapidement, la variole se répand dans cet hôpital. Dans une tentative de briser la contagion, on renvoie à la maison tous ceux assez forts pour prendre leur congé. Il s’agissait là d’une erreur stratégique puisque certains étaient déjà infectés. C’est le début de l’épidémie de « picote » de 1885.
Les conditions sanitaires de la ville empirent la situation. Les latrines sont des trous extérieurs qui débordent quand il pleut. Les rues, non-pavées, sont boueuses et couvertes d’excréments d’animaux. De plus, il n’y a pas d’eau courante dans la plupart des quartiers.
Il faut ré-ouvrir l’hôpital pour les varioleux. Il s’agissait d’un centre de soins dans la forêt, à même le Mont-Royal, non-loin de l’endroit où se situe actuellement le quartier général des pompiers – pas très loin du monument à George-Etienne Cartier. Si les Sœurs Grises prennent la charge de l’hôpital, Mgr Fabre, évêque de Montréal, demande aux vicaires de SJB d’en assurer la desserte. On imagine sans peine les difficultés de ce pénible ministère.
L'ampleur et la durée de cette épidémie sont aggravées par une confusion dans la population, des combats politiques, des mauvaises décisions de santé publique et un rejet de la science par une partie de la population. De son côté, l’Église catholique tarde à appuyer la vaccination. En conséquence, de nombreux Canadiens français résistent à l'ordonnance de vaccination obligatoire de la ville. Cela mènera à une violente émeute entre francophones et anglophones les 28 et 29 septembre 1885. On appelle les secours pour disperser les émeutiers en faisant sonner les cloches de Notre-Dame.
Éventuellement, après avoir tardé à le faire, le diocèse finit par se ranger du côté de la santé publique. Mgr Fabre use de son influence auprès de la communauté francophone afin d'encourager la vaccination. Il commande aux prêtres du diocèse de faire de même. Il montrera aussi l'exemple en se faisant vacciner, deux fois plutôt qu’une. Cette seconde vaccination publique a lieu le 8 octobre 1885, tel que rapporté dans le journal du soir L’électeur « afin de donner le bon exemple de la soumission à la loi ».
L’épidémie aura fait plus de 3 000 morts à Montréal, surtout dans les quartiers défavorisés. Neuf victimes sur dix étaient des Canadiens français, la plupart avait moins de 15 ans.
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