Le second incendie

Nous sommes le 27 juin 1911, par une chaude journée orageuse.

Des torrents de pluie étaient tombés en début de soirée et, bien que la pluie avait cessé, l’atmosphère était encore très lourde, laissant présager un autre orage violent. Une grande conférence au sous-sol de l’église avait dû être écourtée car chaque éclair faisait vaciller les lumières et plongeait le sous-sol momentanément dans la noirceur. À l’extérieur, l’orage avait pris une tournure dramatique. On décide donc de renvoyer tout le monde chez eux à 21 h 15.

Dix minutes plus tard, à 21 h 25, un coup de tonnerre ébranle le temple tout entier. La foudre venait de s’abattre sur l’église Saint-Jean-Baptiste. Certaines sources rapportent que c’est l’une des tours de l’église, celle de l’ouest (Henri-Julien), qui a été frappée. Deux religieuses de l’hospice Auclair déclarent plutôt avoir vu la foudre frapper le dôme. En moins de trois secondes, le feu s’était propagé à l’orgue et au toit.

Le maître de chapelle donne l’alarme. Le curé accourt avec un extincteur mais il est trop tard. L’incendie fait déjà rage. Le vernis frais de la boiserie de l’orgue (inauguré à peine deux jours plus tôt) crépite et fournit un élément propice à la propagation des flammes. Le vicaire court donner l’alarme à la boîte d’appel la plus proche.

Avant même l’arrivée des pompiers, une foule imposante entoure l’église, avertie du drame par la lumière de l’incendie qui éclairait déjà une grande partie du village. Les jeunes gens de la paroisse arrachent aux flammes statues, objets de culte, tableaux et autres objets trouvés dans l’énervement du moment. On sauve les Saintes Espèces et les registres paroissiaux.

Les pompiers doivent enfoncer les grandes portes de l’église pour attaquer l’incendie. Au pire du drame, on dénombre 250 pompiers, huit pompes à vapeur, quatre tours d’eau et huit voitures transportant 30 000 pieds de boyaux et des échelles. Mais l’incendie fait des progrès considérables. En moins d’une heure, l’église n’est plus qu’une fournaise ardente, de laquelle s’envole des tourbillons d’étincelles vers le ciel noir, chargé d’orage.

À peine 35 minutes après le début de l’incendie, le jubé de l’orgue s’écroule avec fracas! Le feu jaillit du dôme majestueux, dont le double toit agira comme une cheminée. Vers 23 h, le dôme s’effondre dans l’immense brasier sous les cris de la foule. Suivront les toits, les corniches, les murs… À chaque affaissement, le sol tremble sous les pieds de la foule. On craint pour les clochers mais ceux-ci survivront à l’incendie.

L’église est anéantie. Seuls les murs du bas, les clochers et le presbytère sont épargnés. Les dommages s’élèvent à 200 000 $ (6.4 millions en 2023). L’assurance ne couvre que 175 000 $. Par miracle, le chèque pour payer l’assurance sur l’orgue venait d’être déposé à la banque l’après-midi même, quelques heures avant l’incendie.

La seconde église n’aura duré que 8 ans.

L’édition de la Presse du 28 juin 2011 consacre pratiquement deux pleines pages au drame.

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Rodrigue Escayola

Avocat

Rodrigue est avocat en droit immobilier. Les dimanches, il participe aux célébrations de façon très concrète: pour la sonorisation et la diffusion des messes.