Le mystère Nincheri
Plusieurs sources de notre époque rapportent que les vitraux de SJB (ou, à tout le moins, que certains d’entre eux) sont l’œuvre de l’illustre Guido Nincheri. Cela est peu probable, puisque la presque totalité des vitraux de la nef, nous l’avons vu dans le billet précédent, sont installés en 1917, alors que le travail de Nincheri à l’église a pris place en 1932.
Il est possible que Nincheri ait travaillé sur certains vitraux alors qu’il était apprenti auprès de Perdriau – à une époque coïncidant à peu près à l’installation des vitraux à SJB. En effet, Nincheri arrive au Canada en novembre 1915. Il travaille alors sous l’aile de Perdriau. Donc s’il a travaillé sur certains vitraux de SJB, ce sont soit ceux de la chapelle, soit les médaillons représentant le Christ et les apôtres autour du chœur, soit la demi-lune à l’entrée présentant la multiplication des pains. Soit dit en passant, ce style de vitrail figuratif correspond tout à fait aux traits connus de Nincheri, même si le vitrail est clairement signé Perdriau.
La « véritable » contribution de Nincheri à SJB date de 1932, lorsqu’on lui demande « d’habiller » la nef. Si l’époque des travaux est surprenante, alors que la métropole est en pleine crise économique, le choix de l’artiste va de soi. Nincheri, qui a décoré des centaines d’autres églises, est, avant tout, un décorateur d’église et un maître des fresques.
À SJB, Nicheri décore les frises faisant le tour de la nef avec des inscriptions latines. Il installe de grandes toiles marouflées au second étage, au bout des transepts (comme celles que l’on voit encore dans le dôme). Celles des transepts sont aujourd’hui disparues. Il y avait aussi beaucoup de bleu – on en voit encore quelques traces, dans les contrefiches au-dessus des colonnes supportant les jubés latéraux et au-dessus des autels latéraux en avant.
Malheureusement, une grande partie de l’œuvre de Nincheri n’existe plus, perdue à tout jamais aux ravages du temps, des rénovations et des couches de peinture. Même les innombrables fleurs de lys qui tapissaient autrefois les murs de la nef sont disparues sous les coups de pinceaux, lorsqu’il a fallu replâtrer et repeindre les murs en 1976.
Néanmoins, la touche de Nincheri subsiste encore dans un seul endroit : le baptistère! Le fait que le baptistère était utilisé comme salle d’entrepôt (!) l’aura sans doute sauvé des ravages des rénovations! Vous pouvez donc retourner dans le temps si vous jetez un coup d’œil dans le baptistère (tout près du coin où on sert le café après la messe).
Guido Nincheri (1885-1973) est un artiste du vitrail et fresquiste canadien d’origine italienne. Il est possiblement l'artiste ayant produit le plus grand nombre d'œuvres religieuses au Canada durant le 20e siècle. Ses vitraux et œuvres ornent environ 200 bâtiments, surtout des églises. En 1940, il est interné pendant quelques mois à Petawawa pour avoir peint le portrait de Mussolini sur la voûte de l'église Madonna Della Difesa (dans la petite Italie). Sa femme assurera sa libération en démontrant que l’ajout du Duce était une demande du curé qui ne figurait pas sur les plans d’origine.
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