Le village de Saint-Jean-Baptiste

Retour au début des années 1800. Montréal, encore sous le contrôle des Sulpiciens, est en grande partie limitée à la ville fortifiée dans le vieux port. La Seigneurie est divisée en « côtes » plutôt qu’en rangs (Côte Saint-Luc; Côte Sainte-Catherine; Côte des neiges…). Jusqu’en 1850, la Côte de la rue Sherbrooke marque la fin de l’expansion urbaine – sauf pour le boulevard Saint-Laurent que les Sulpiciens ont déjà tracé Nord-Sud pour diviser l’île.

De grands domaines agricoles couvrent l’actuel Plateau Mont-Royal. L’Hôtel-Dieu existe déjà, mais se situe en pleine campagne. Les cultivateurs ont délaissé le blé pour des cultures plus payantes comme celles des fruits et des pommes de terre. Ils prennent aussi des vaches laitières en pension.

L’industrie du moment, soit l’extraction de pierre calcaire et les tanneries, crée des petites agglomérations de population à l’extérieur de la ville. La population se déplace à mesure qu’on extrait la pierre des carrières. Une telle agglomération apparaît au coin des rues Sanguinet (maintenant Henri-Julien) et des Tanneries (aujourd’hui l’avenue Mont-Royal).

Nous sommes sur la terre du notaire Cadieux. Il voulait la lotir, mais il décède avant de pouvoir le faire. C’est donc sa succession qui prend la relève et ouvre les rues Rachel, Marie-Anne, Napoléon et Roy… tous des noms des enfants du notaire Cadieux. L’avenue Laval aussi portait anciennement le nom d’un de ses enfants : Elizabeth. La rue Duluth, quant à elle, s’appelait… la rue Saint-Jean-Baptiste! Elle marque le début du village!

La population du village arrive en grande partie de la ville de Montréal, poussée en campagne par le grand incendie de 1852. Montréal, qui a appris de l’incendie, exige des constructions en brique ou en pierre. Ici au village, on peut encore construire en bois : c’est moins cher.

Le village de SJB est créé le 5 janvier 1861. Le tramway arrive en 1864, ce qui facilitera l’expansion du village. Le marché du village est construit au coin Rachel et St-Laurent (c’est maintenant le parc des Amériques). Le conseil municipal siège au second étage du marché.

Dans les années 1870, quatre promoteurs lancent un gigantesque projet immobilier : ce sont Messieurs David, Rivard, Laurent et Drolet (on reconnaît le nom de certaines rues). Pour mousser la vente des terrains, il faut trouver un point d’ancrage. En 1872, les promoteurs ont l’idée de donner 20 de leurs lots pour y construire une église. Ces 20 lots se situent entre Henri-Julien et Drolet, et vont de Rachel à Marianne. La façade actuelle de l’église occupe deux de ces anciens lots. Le don se fait à la condition que les lots soient utilisés pour bâtir une église catholique, et à la condition que les promoteurs n’aient jamais à payer de taxes d’église. C’est brillant! Ils n’auront pas à financer à même leur poche la construction de l’église qui leur permettra de vendre leurs lots aux habitants.

Le village de SJB est né!

Autres articles de la série du 150e anniversaire:

Rodrigue Escayola

Avocat

Rodrigue est avocat en droit immobilier. Les dimanches, il participe aux célébrations de façon très concrète: pour la sonorisation et la diffusion des messes.